Moi : Je confesse à Dieu que j’ai péché … par action et par omission …
Dieu : Eh bien Don Samsamillo … que t’arrive-t-il ?
Moi : j’ai honteusement drafté à l’Alpe d’Huez, mon Père …
Dieu : ce n’est pas bien …
Moi : En natation, j’ai pris toutes les jambes que j’ai pu … sauf sur le dernier tiers, une andouille m’ayant emmené vers l’extérieur, j’ai dû faire l’effort de me recentrer … A vélo, j’ai délibérément pris les bonnes roues jusqu’au pied de l’Alpe … Vous comprenez, je ne suis pas un grimpeur et pas encore vraiment en jambes depuis ma reprise … je tenais à me préserver avant la longue procession de l’Alpe … que j’ai entamé très pieusement d’ailleurs, un peu comme à Rumilly … est-ce grave ?
Dieu : Es-tu sûr de tout me dire, Don Samsamillo ?
Moi : Non … au ravito de l’Alpe, je me suis arrêté pour prendre un bidon et préparer la suite … car il était temps pour moi de prendre enfin l’initiative …
Dieu : Enfin qqch d’autorisé … j’imagine que tu ne fais pas contrition pour un bidon …
Moi : Non … là, je me suis aperçu que Frère Sylvain m’avait fait le coup du ravito …
Dieu : Allons, allons … La sainteté du Frère Sylvain te dépasse de beaucoup, mon cher Samsamillo. Je l’ai consacré bien avant toi… Il est d’ailleurs tellement pieux qu’il se complait dans l’eau bénite …
Moi : Justement … je me suis empressé de le reprendre et de suivre son exemple …
Dieu : L’as-tu aidé à porter sa Croix ? Il n’est plus tout jeune … tu le sais …
Moi : J’ai horriblement péché … Je n’ai d’abord pas voulu troubler sa profonde méditation … vous comprenez, ma présence eut pu géner sa concentration … Et puis, j’ai découvert un confort coupable sous son aile … j’ai pris la mesure de l’importance d’un équipier, même en montagne …
Dieu : J’imagine que Frère Sylvain n’est pas resté dupe …
Moi : Il était tout à vous, mon Père. Il ne s’est pas aperçu de ma présence et je me suis bien assuré d’être transparent … je me déportais sur l’extérieur à chaque virage et je prenais bien garde de rester derrière …
Dieu : Tu lui as donc laissé faire tout le travail ? alors qu’il avait déjà fait l’effort de te remonter ….
Moi : Oui, j’ai honte … voyez-vous, j’ai souvent eu l’occasion de constater que notre niveau à vélo est très comparable … de fait, son rythme me convenait parfaitement, et j’avais conscience que toute initiative de ma part à ce stade serait vaine, et inutilement dispendieuse … je me suis rappelé ce vœu de pauvreté qui vous est cher … et puis, son niveau reconnu bien supérieur en cap m’astreignait à cette pénitence … si je voulais tenir le rythme, et l’accompagner jusqu’au bout de la procession, je devais rester derrière …
Dieu : es-tu en train d’essayer de me faire croire que tu as fait acte d’humilité ?
Moi : Absolument … arrivé à l’Alpe, j’ai jugé bon de manifester enfin ma présence et mon soutien, et de lui ouvrir la route sur le dernier km, je me devais de m’assurer que l’aire de transition soit en bon ordre pour son arrivée …
Dieu : Tu es trop bon …
Moi : J’ai en effet tout donné ensuite … enfin, je concède une petite retenue … je m’attendais à être rattrapé sur la cap … et il m’aurait fallu tenir … c’était mon défi céleste … ma croix ultime … suivre le très saint Frère Sylvain …
Dieu : C’eut été justice, mon fils … après tout l’effort réalisé par votre saint Frère …
Moi : Oui, mais je crois qu’il a payé son début de l’Alpe sur la cap … enfin, sur la première partie, car je l’ai dangereusement vu revenir sur la seconde moitié …
Dieu : Et qu’as-tu fait ?
Moi : J’ai été lâche … j’ai pris peur … une sorte de vision apocalyptique … la fatigue peut-être … l’altitude probablement … j’ai détalé … en le laissant finalement derrière …
Dieu : Don Samsamillo, c’est très mal. Tu feras mille fois pénitence. Au pèlerinage d’Embrun, tu attendras Frère Sylvain dans les gorges de la Guil et sur les pentes de l’Izoard, et tu le porteras jusqu’aux portes d’Embrun … Tu porteras ta croix jusqu’au bout ce fois-ci, et le chemin sera long !
Moi : Oui mon Père … mais il va me faire la nique sur le marathon !
Dieu : Homme de peu de foi … comment peux-tu encore douter après tant d’années … Aide-toi et le Ciel d’aidera …
Moi : Oui mon Père … je ferai pénitence à Embrun …
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2016 : j'ai perdu à la courte paille