Maman Bowden est de retour
Après avoir donné la vie à un petit garçon dénommé Tyson Kennedy il y a sept mois, la Canadienne Lori Bowden rongeait son frein, et même si elle dit adorer être maman, la compétition lui manque… et elle manque à la compétition
"C'est fabuleux. C'est ce qu'il y a de plus beau. J'adore cela," Lori est aux anges lorsqu'elle parle de son fils de 7 mois. "Il n'y a rien d'autre que vous ne puissiez plus aimer au monde que votre propre enfant."
Quand on lui demande si elle a retrouvé sa ligne et perdu les kilos de trop dus à la grossesse, elle plaisante, "Je pourrais être un tout petit peu moins ronde. J'ai juste une poitrine un peu plus grosse."
Cela ne l'empêche pas d'être une sportive, et sa reprise avec les activités extérieures s'est faite grâce à la plongée, au VTT ou encore au ski sur route. Il n'y a désormais aucun doute qu'elle reprendra la course aussi tôt que possible : "C'est ce que j'aime faire," dit-elle. "Je serais folle de ne pas revenir. Si j'essaye et que je ne suis plus compétitive dans deux ans, alors oui il faudra que je me trouve un autre job, et vite !"
La double Championne du Monde à Hawaii a planifié de courir deux Half-Ironman en Colombie Britannique en juin, puis de faire son retour sur la distance Ironman le 16 juillet pour l'Ironman Autriche. Sans véritable plan d'entraînement, Lori avoue qu'elle ne sait pas trop combien d'heures elle passe à s'entraîner dans la semaine "Je sais juste ce que j'ai à faire," avoue-t-elle.
Lorsque Lori va s'entraîner, ce sont des amis, qu'elle a nombreux autour d'elle, puisqu'elle vit à Victoria depuis 1996, qui gardent Tyson au bord de la piscine, ou bien chez lui lors des sorties à vélo. Mais la Canadienne ne se met pas la pression, préférant jouer avec son fils plutôt que de faire une séance de natation :"L'entraînement peut attendre !"… Tout un programme !
La dernière course de Bowden est le Championnat du Monde Ironman en 2004. Comme Championne du Monde en titre, elle n'avait alors terminé que 11ème, une grosse déception pour une femme qui avait terminé, première, troisième, seconde, seconde, première, seconde et enfin seconde les sept dernières années. Ce que les spectateurs n'ont pas su est qu'elle était arrivée malade sur la course.
"J'ai attrapé froid et j'avais beaucoup de mal à respirer," se rappelle-t-elle. "J'ai essayé de me dire, 'C'est bon, ça va être long, tu n'a pas besoin de respirer trop fort, tu n'as pas besoin d'aller trop vite."
Au début du vélo elle était piquée par une guêpe et a commencé à avoir des maux d'estomac.
Elle fut alors assez fière d'avoir terminé. Mais sa place n'était que 11ème, ce qui pour elle, auteur de 12 victoires sur Ironman et troisième au rang des plus titrées sur la distance après Paula Newby-Fraser (24) et Heather Fuhr (14), est un souvenir assez dur à encaisser.
"Ma dernière course à Kona est un mauvais souvenir," commente Bowden. "Les gens ont seulement vu que j'étais mal classée. Mais à avoir été tellement mal, je suis vraiment heureuse d'avoir terminé. Je ne voulais pas m'arrêter et abandonner. Je veux maintenant définitivement y retourner et montrer que je peux encore courir."
Cette 11ème place est aussi dans le cœur de Lori une pale comparaison avec l'année 2003 ou le couple Lori Bowden / Peter Reid avait gagné à Kona, dans ce qui était une superbe histoire ou un mari et sa femme gagnaient la plus grande course de triathlon au monde. Le couple est désormais séparé et un divorce est même engagé. Et l'an passé, lorsqu'elle était enceinte de Tyson, une des meilleures amies de Lori, Holmes, décédait suite à une leucémie.
"Je plaisante toujours avec mes amis qui se plaignent de leur vie qui est soit disant ennuyeuse, en leur disant que j'aimerais que ma vie soit ennuyeuse. Il y a tant de choses que l'on peut faire dans la vie. La mort de Holmes a été dure. Je suis très proche de tous mes amis. Je suis une personne très émotive. Une partie de moi était très triste car je savais qu'elle ne pourrait jamais voir mon bébé."
Que ce soit l'imagination ou la force du rapport entre Lori et Holmes, Bowden jure qu'il y a des périodes ou elle regarde Tyson et y voit son amie.
"Il a toutes ces différentes grimaces qu'elle faisait, " dit-elle, "Je la vois en lui."
En juillet à Klagenfurt, la communauté du triathlon aura les yeux rivés sur le retour de Lori Bowden.
"Lori fait partie de notre univers," commentait Bob Babbitt, co-responsable de Competitor Magazine et membre du célèbre Ironman Hall of Fame. "Elle a débuté sa carrière en groupe d'âge. Elle est juste une personne très heureuse et sans complexe, la personne que n'importe quel groupe d'âge peut venir voir et avec laquelle il pourra engager une conversation.
Tout le monde viendra voir en Autriche ce que Lori fait, si Lori va bien, et les gens se demanderont : est-ce que Lori va bien se comporter ? A-t-elle assez d'entraînement ? Mais croyez-le, son résultat à Klagenfurt l'emmènera à Kona en octobre."
Ses qualités à pied semblent être au rendez-vous. Sur une course montagneuse elle était récemment en 39 minutes aux 10km. "Je me sens pareil à vélo, peut-être mieux," conclut-elle.
Elle aura 39 ans lorsqu'elle courra en Autriche et renvoie dans leurs cordes tous ceux qui lui parlent du facteur "âge" : "Quel âge a Natascha (Badmann) ?" reprend-t-elle.
"La "Swiss Miss" aura 40 ans en décembre, quelques semaines après Hawaii. Comme bon nombre de triathlètes pros qui courent encore, comme Karen Smyers, mère de deux enfants, et qui a terminé 9ème à Hawaii l'an passé. Elle a 44 ans. Heather Gollnick, mère de trois enfants, a terminé seconde ce mois-ci en Arizona".
Résumé pour Lori : elle est heureuse en tant que maman et affamée en tant qu'athlète.
"Je pense que de temps à autre il faut faire un break, ce qui est bénéfique. Cela fait apprécier le monde différemment. L'entraînement est dur pour les distances Ironman et peut devenir pénible. Après un arrêt, vous appréciez chaque heure d'entraînement".