Bon, je profite de ma pose méridienne pour y aller de mon petit CR.
Difficile de résumer en quelques mots toutes les émotions vécues ces derniers jours, tellement riches et nombreuses que j’ai l’impression de revenir d’un voyage de deux mois au fin fond de la brousse, peut être parce que dans ce genre d’expérience (un peu initiatique) tu vas piocher au plus profond de toi-même et que durant ces heures d’efforts (12H41 exactement en ce qui me concerne), tu passes par toutes les phases, de l’euphorie à la souffrance, et tu plonges souvent dans une réflexion proche de ce que doivent connaître les chamans (promis, je ne suis pas sous l’influence de substances illicites …). Bon allez … après la réflexion philosophique à 2 euros … l’action.
Départ de Lyon en voiture mercredi matin à 8H00 en compagnie du POU, de CED et de son neveu JONATHAN, venu l’encourager pour l’occasion (même si le tri n'a pas eu l’air de le transcender outre mesure). 12h00 de route ça laisse le temps, non seulement de parfaire son hydratation mais également de mieux se connaître et là je découvre deux gars supers, au caractère complètement différent mais tous deux attachants avec une bonne expérience du long qui me permet de mieux visualiser ce qui m’attend, merci encore les gars pour votre compagnie et vos enseignements …
Les deux jours qui suivent se passent entre retrouvailles avec les autres rilliettes, finalisation de la préparation (petite baignade le vendredi et court enchaînement vélo-CAP le samedi) puis les formalités d’usage (inscription, pasta party, enregistrement,…) un peu usantes à mon goût pour une veille d’effort prolongé.
Levé 4H00 du mat, petit déjeuner puis direction le parc à vélo où on retrouve toute la bande. La pression monte, on voudrait retenir tous ces moments mais ça s’enchaîne vitesse grand V, derniers préparatifs et on se retrouve sur la plage où 2700 fêlés attendent le départ. Un monde fou pour nous encourager, les pontons sont remplis et l’ambiance est vraiment surréaliste. Le coup de canon retenti, je vérifie qu’il n’y ait pas de blessé autour, apparemment c’est bon … je me jette à l’eau et c’est parti mon Cricri, pas de panique t’en a juste pour, au mieux, une demi-journée d’effort. J’essaie de faire un rythme mais les 500 premiers mètres sont difficiles, contrairement à ce que je pensais, ça tabasse pas mal. J’arrive enfin à me caler sur le mode enclume auquel je suis habitué et la nat. se passe globalement bien (pour mon niveau bien entendu). Une seule boucle avec un allé de 1400 m, une largeur de 450 m et un retour de la différence avec un final de plus de 900 m dans un canal couvert de spectateurs qui t’encouragent… c’est tout simplement énorme …Je sors de l’eau en 1H30 plutôt frais (normal pour un gars qui était dans l’eau), ce que j’avais prévu (plus le chrono que la fraîcheur) … comme disait le gars qui tombait de l’immeuble en passant à chaque étage : jusque là tout va bien.
T1, je me change intégralement pour passer en tenu vélo et j’enfourche ma monture. Deux boucles de 90 KM, 800 m de D+ par tour avec deux bosses annoncées : DROBOLLACH au km 30 (1250 m à 7 % de moyenne) et RUPERTIBERG au km 70 (2500 m à 6 % de moyenne avec passage à plus de 11 %). Je reste dans le souci de gérer au mieux mon effort et dés que je me sens euphorique (c’est à dire à peu prés tout le temps vu que j’suis comme un gosse qui découvre EURODYSNEY), je me force à enlever quelques dents pour mouliner. Début du parcours très roulant, ça envoi du lourd autour de moi et je me fais doubler par tout un tas d’avions de chasses et de gars en casques aéros. Arrivée à la première bosse, certains avions de chasse ont été touchés par la DCA, le rythme est plus à ma main, je double pas mal. La partie qui suit est très vallonnée mais malgré tout roulante, je reprends le POU puis GUIGNOL puis je me retrouve vite sur la montée de RUPERTIBERG ou l’ambiance est délirante, on se croirait sur le tour de France avec inscription sur la route, foule hurlante sur le bas côté et sono à fond. Deux paliers à passer qui font mal aux pattes mais ça n’entame pas mon moral.
Je retrouve JUAN LUCA à la fin du premier tour que je termine en tapant dans les mains du public remonté comme une pendule et c’est reparti pour la deuxième boucle, début une nouvelle fois plus roulant puis arrivée de DROBOLLACH, ça passe correctement mais les jambes ne sont plus ce qu’elles étaient. Je sens comme un coup de moins bien, et là, grosse erreur, j’oublie de me ravitailler en boisson ISO et je me retrouve sans boisson jusqu’au ravito suivant, soit environ une vingtaine de KMS. Je vais le payer cash … gros coup de mou sur la fin du parcours d’autant que la chaleur commence à monter et qu’on se prend un orage avant l’arrivée. Je gère au mieux et je pose le vélo en à peu prés 6H00, ce que j’avais programmé, mais en me disant que le marathon sera très très chaud … dans tous les sens du terme.
T2- Passage de la trifonction rilliette et départ CAP, l’enchaînement se fait plutôt bien même si les jambes sont lourdes, il faut juste se faire à l’idée qu’on attaque un marathon après 7H30 d’effort, ce qui apparaîtra comme une aberration à tout bon marathonien qui se respecte. Les ravitos tous les 2 KMS et le public très présent sont les bienvenus. Je rattrape VB vers le 15ème KMS et je continue mon petit rythme jusqu’au semi et là, terminus tout le monde descend, le mental est entier mais les jambes ne suivent plus, impossible de courir. Je continue en marchant tout en me disant que ça va revenir, ça ne peut pas être autrement … Je rejoins LOLO un peu plus loin qui décide d’abandonner, j’essaie de le motiver à continuer mais rien à faire. Il me faudra une bonne heure et pas loin de 10 KMS pour récupérer des forces et pouvoir à nouveau courir. Entre temps je vois passer le POU puis VB en mode pilote automatique. Je reprends un peu d’ardeur sur le dernier aller-retour après avoir vu mes parents, je recommence à trottiner. GUIGNOL que je croise dans son premier aller-retour me dit que VB est plus loin HS. Je la retrouve en train de marcher et de faire la causette avec un français (ah, les femmes, on peut pas les laisser seules 5 mn …). On discute et je décide de rester avec elle pour finir, je suis plus à 5 mn prés et ça me fait plaisir de boucler ce premier IRON avec une rilliette de la trempe de VB. Elle en bave mais son mental énorme la fait avancer … cette fille est surhumaine. On enchaîne les passages en marchant et quelques petites portions en courant. Finalement la proximité de l’arrivée nous bouste et on finit en courant sur les derniers kms. Le finish est indescriptible avec passage sous l’arche, le public et le speaker qui mettent une ambiance de feu. Gros moment d’émotion. Me voilà finisher et finalement pas trop entamé, heureux d’avoir relevé ce défit et de ma préparation qui me permet de rentrer à la maison le sourire aux lèvres prés à repartir. Durant tous ces moments j’ai pensé très fort à mon frère qui m’a fait le sale coup de me laisser fils unique en 2008, à mes parents qui ont fait le déplacement pour assister à la course malgré les soucis de santé de ma mère (et qui m’ont grandement aidés dans ma préparation en me donnant le jour …), à mes femmes qui m’ont supporté au quotidien dans ma préparation et sans lesquelles je n’y serais jamais arrivé (je sais, ça fait un peu Michel Drucker mais je le pense vraiment…), à ce club de dingue qui est maintenant devenu une seconde famille et enfin, à mes sparring-partners Didier pour la CAP et Jérôme pour le vélo qui m’ont aider à mieux supporter toutes ces heures d’entraînement, merci à vous tous qui nous avaient suivi et encouragé dans ce qui pour moi reste la réalisation d'un rêve de gosse (KOKO, KARINE qui sont restées sur le pont toutes la journée pour nous encourager et les autres rilliettes qui ont suivies la course sur le net, j’ai lu vos posts, c’était terrible).
Bravo à toutes les rilliettes qui étaient sur place et qui du premier au dernier, classés ou pas, ont tout donné.
L’IRONMAN, même en partie perverti par le côté business (mais il y a d'autres courses que celles labellisées), reste vraiment une expérience unique qui mérite d’être vécue ... enfin ce n'est que mon humble avis (pas mal comme conclusion ça, non
).
Cricri.